• Orthorexie et minceur

     

     

    L’orthorexie ayant été classée dans les TCA (troubles du comportement alimentaire), presque au même titre que la boulimie, l’hyperphagie, l’anorexie, qui toutes entraînent des problèmes de poids même s’ils sont très différents d’une pathologie à l’autre, on peut légitimement se poser la question de savoir si les orthorexiques rencontrent les mêmes difficultés.

    Comme rien n’est jamais vraiment simple… il me semble que c’est à la fois oui et non.

     

    — Tout d’abord on peut dire que oui, les orthorexiques ont aussi des problèmes de poids. Qu’ils puissent se retrouver en surpoids ou obèses me paraît une évidence. L’orthorexique ne se prive aucunement en quantité, c’est la qualité des aliments qui est en jeu (je simplifie pour les besoins de cet article, car c’est plus compliqué que ça, bien sûr).

    Si un ou une orthorexique prend un repas composé mettons d’une omelette de quatre œufs (y compris si tout ça vient d’un petit élevage local où les poules ont été élevées en plein air et nourries en bio), d’un gratin de pommes de terre également bio, et termine par un gâteau entier même s’il a été réalisé sans gluten, sans lactose, sans additifs, et uniquement avec des ingrédients sains, je ne vois pas comment il ou elle ne prendra pas de kilos. Manger bien ne veut pas dire manger peu.

    On peut se nourrir avec les meilleurs produits du monde (si tant est que les meilleurs produits du monde existent), on grossira toujours si on les consomme en excès, à moins d’être un sportif de haut niveau qui brûle une énorme quantité de calories tous les jours. Rien ne permettra jamais de sortir du fait qu’on ne peut avoir un poids stable qu’en absorbant chaque jour autant de calories qu’on en dépense… et non deux ou trois fois plus !

    D’ailleurs, je ne vois pas ce qui empêcherait un(e) orthorexique d’être hyperphagique, il n’y a rien d’incompatible entre les deux. Il n’y a qu’à parcourir les forums de régimes pour s’en convaincre. Si certaines (j’écris au féminin car les femmes semblent plus touchées, ou du moins s’expriment beaucoup plus sur ce sujet) sont clairement adeptes de la malbouffe, d’autres sont visiblement très pointilleuses sur leur alimentation… ce qui n’empêche ni leur surpoids, ni leurs crises de compulsion.

    J’avais noté d’ailleurs dans mon article sur Linecoaching la tendance de certaines, qui font ce programme pour perdre des kilos, à surveiller la qualité de leur nourriture à la façon des orthorexiques (cette tendance étant d’ailleurs combattue par les deux médecins du site qui semblent penser qu’elle empêche un rapport normal avec l’acte de manger).

    Aux USA, un professeur de nutrition, Mark Haub, a perdu 12 kilos en n’avalant pendant deux mois et demi que de la malbouffe… mais en quantité contrôlée. C’est donc la somme des calories que l’on ingère qui fait grossir, et non la qualité des aliments. (Par contre, c’était juste une expérience, je doute que cet Américain ait continué ainsi pour des raisons évidentes de santé.)

     

    — En même temps, il me semble que l’orthorexie peut contribuer à ce qu’on ait moins de problèmes de poids.

    La première raison, c’est que j’ai la conviction que certains produits industriels créent une dépendance (et je pense que c’est même fait volontairement, pour des questions de profit). On peut m’affirmer le contraire, me dire que ça n’a jamais été formellement démontré, que ça relève d’une théorie du complot, cette certitude, que je ne suis pas la seule à partager, est liée à ma propre expérience.

    Ainsi, je ne finis pas un repas sans dessert (gâteau, biscuits). Presque toujours, dans mettons 95% des cas, ce dessert a été confectionné par moi, et j’en mange une petite quantité pour me faire plaisir. Les rares fois où je termine par une pâtisserie industrielle (ce qui se produit principalement si je ne suis pas chez moi), je me rends bien compte qu’il me serait plus difficile de m’arrêter si je ne faisais pas attention. Question peut-être de sucres rajoutés, de consistance addictive, je ne sais pas au juste, mais je l’ai clairement constaté.

    La seconde raison, selon moi, c’est que lorsqu’on est orthorexique, on a évidemment tendance (et c’est même la définition) à être très attentif à ce qu’on absorbe. Être soucieux de la qualité de ses aliments signifie être soucieux de sa santé, de son bien-être, et on n’éprouve pas de bien-être si on se « goinfre »… On risque d’être au contraire lourd, fatigué parfois, voire même déprimé, avec d’éventuels problèmes digestifs. Donc, il me semble qu’on sera beaucoup plus tenté de respecter les signaux de son corps et de ne pas manger en excès pour ne pas anéantir tous les efforts que l’on fait par ailleurs.

    Personnellement, je ne concocte pas mes menus en me posant mille questions, je n’écume pas les magasins bio, je ne lis pas une multitude d’articles sur la nutrition si c’est pour me sentir mal après les repas. Donc oui, si ma préoccupation première est de manger sainement, je préfère également me modérer. J’ai besoin d’être en bonne intelligence avec mon alimentation… et je le suis si je ne me prive de rien mais en juste quantité.

    Donc, de ce point de vue-là, je suppose que la minceur peut être associée à l’orthorexie.

     

    De toute manière, ces questions de poids sont tellement complexes qu’on ne peut poser une équation simple qui serait : orthorexie = minceur, malbouffe = surpoids. Ça se saurait si les gens qui mangent « bien » étaient tous minces… et ils ne le sont évidemment pas !

     

    Pour mon expérience personnelle, je peux simplement dire qu’adopter la meilleure nourriture possible m’a libérée des troubles du comportement alimentaire. Je ne l’explique pas de façon rationnelle (même si j’ai quelques hypothèses), je le constate. On pourra bien sûr me rétorquer qu’il n’y a pas de lien entre les deux, que c’est un hasard… ça me paraît quand même douteux.

    Depuis que je suis débarrassée des TCA, j’ai une tendance un peu maigrichonne même si je ne me prive jamais. L’orthorexie serait-elle synonyme pour certains comme moi de poids bas ? Mais en même temps, je suis sans doute plutôt revenue à ma morphologie génétique : les femmes de ma famille étaient très minces, il aurait donc été relativement surprenant que j’aie des kilos en trop en me mettant à manger exactement ce dont j’ai envie, quand j’en ai envie, dans la quantité adéquate.

    L’orthorexie m’a redonné d’une certaine manière un rapport simple à la nourriture par rapport au poids. Me mettre à table est désormais un plaisir, non plus une angoisse. Même si une forme d’angoisse est quand même bien là. Mais elle s’est déplacée, elle réside dans le choix des aliments, dans leur association, dans leur cuisson, ce qui est bien moins pénible que celle que l’on éprouve quand on est au régime ! Et être délivrée de la peur de grossir, de la nécessité de maigrir, quelle renaissance ça a été !

     

     

     


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